Gestion des talents : de beaux défis en perspective

 

Un article initialement publié dans le Magazine Technologia.

 

Entre l’obsolescence accélérée des compétences techniques, l’incertitude du marché et l’apparition de nouveaux métiers, étant favorisées par les évolutions technologiques incessantes, les spécialistes en ressources humaines ont de beaux défis à relever. Les employé·es aussi.

Et un défi, c’est une bonne nouvelle! C’est l’occasion de se remettre en question et de repenser ses pratiques… d’évoluer. Ce sera d’ailleurs plus une nécessité qu’un choix, car le marché va significativement changer, si l’on considère que 80 % des emplois de 2030 n’existent pas encore. L’année 2030, c’est dans 5 ans… À quel point sommes-nous prêts à faire face à cette transformation?

 

S’adapter à un environnement en pleine mutation 

 

Si personne ne peut lire l’avenir, nous devons toutes et tous surveiller les tendances du marché et des technologies pour tenter d’anticiper les besoins futurs et de maintenir l’employabilité de l’ensemble du personnel. Bien sûr, il faut le faire en prévoyant des plans de développement, mais aussi en encourageant chacun et chacune à se responsabiliser quant au maintien de ses savoir-faire et savoir-être. En faisant preuve de proactivité, grâce à une mentalité d’apprentissage en continu, on s’assure une certaine adaptabilité, propice pour évoluer avec son entreprise (ou une autre).

Cela est d’autant plus important que l’on note déjà un écart entre les besoins des employeurs et les profils des candidat·es.

Pour éviter que l’écart ne se creuse, il faut anticiper la disparition de postes au profit de l’intelligence artificielle, intégrer la maîtrise de l’IA aux cursus scolaires et se préparer à l’émergence de nouveaux métiers, par exemple spécialiste de requêtes (prompts) ou encore gestionnaire d’équipe humains-machines.

 

Repenser le cycle de recrutement 

 

Sachant que certains postes disparaîtront tandis que d’autres émergeront, il faudra repenser le processus de recrutement pour le rendre plus créatif, mais surtout plus agile. Cela permettra d’identifier des talents qui, bien que ne correspondant pas parfaitement au profil recherché, posséderont un potentiel de développement. Pour y parvenir, le processus devra être fluide et intégrer une réflexion critique sur les technologies utilisées, notamment l’intelligence artificielle, afin d’éviter l’exclusion de candidat.es dont le CV n’est pas entièrement conforme aux critères standards.

Si l’obsolescence des compétences techniques exige de privilégier des aptitudes transversales, comme la créativité, la collaboration et l’intelligence émotionnelle, les entreprises devront revoir les compétences recherchées en entretien et mettre davantage l’accent sur les compétences comportementales… autrement dit l’humain en soi.

Voici quelques axes de réflexion dans le processus de recrutement :

 

Prioriser le savoir-être et la capacité d’apprentissage continu

 Il faut réussir à faire le tri dans la liste de Noël : trop d’annonces ressemble davantage à une accumulation compulsive qu’à un profil réfléchi répondant à un besoin bien cerné.

Le savoir-faire s’apprend. Possiblement «sur le tas», si l’on en croit la rapidité des changements (d’ailleurs n’avons-nous pas tous appris à utiliser ChatGPT en même temps qu’il a été rendu disponible?). Notre capacité à développer de nouvelles habiletés sera donc plus centrale que la connaissance elle-même. En ce qui a trait au savoir-être, l’apprentissage est plus délicat. Il y a fort à parier que, parmi les compétences recherchées, quel que soit le domaine, on retrouve l’intelligence émotionnelle, la résilience face au changement, la créativité ou encore l’esprit critique. La capacité à s’adapter, à apprendre continuellement et à collaborer efficacement semble aussi particulièrement importante pour les métiers de demain, puisque l’on ne sait pas de quoi ils seront faits.

 

Valoriser l’individu et l’adéquation avec la culture d’entreprise 

 Un CV n’a jamais défini personne. L’important, c’est qui vous êtes, ce qui vous fait réagir, vos valeurs et vos motivations. Il est primordial que ces traits personnels soient alignés avec les valeurs de l’équipe et de l’entreprise, car ils sont plus difficiles à changer. Le fait que des savoirs sont manquants n’est pas très important, puisqu’ils peuvent être appris. D’ailleurs, certain·es employé·es font preuve de beaucoup de proactivité dans la gestion de leurs savoirs: ils et elles n’hésitent pas à signaler quels apprentissages leur seraient nécessaires pour rester à jour ou s’améliorer. Cette démarche est toujours appréciée par les gestionnaires, dont la feuille de route est déjà chargée.

 

Le processus d’intégration est clé… plus que jamais!

 L’intégration doit aller bien au-delà du sympathique «Bienvenue chez nous, voilà ton poste de travail!». Lors de sa dernière conférence au Congrès des CRHA, Sonia Lupien soulignait la nécessité d’une intégration sur la durée, en présence, avec le ou la gestionnaire. Cette période d’intégration est d’ailleurs trop souvent une occasion manquée d’outiller une recrue et de l’aider à faire sa place dans son nouvel environnement. Une fois que tout est beau sous le soleil, et que les deux parties sont heureuses de leur collaboration, il faut continuer. C’est bien rare que l’on se dise oui pour la vie.

 

Coconstruire des parcours alignés

 Pour assurer un maximum de rétention, les équipes RH et les gestionnaires doivent prévoir des plans de développement alignés sur les objectifs d’affaires et les aspirations professionnelles du personnel. Si les entreprises s’organisent pour élaborer les plans de développement de compétences de leurs équipes selon les objectifs d’affaires, elles donnent également la responsabilité à chacun et chacune de se prendre en main, d’investir en soi. Après tout, les compétences accompagnent la personne qui les a développées le jour où celle-ci quitte l’entreprise.

La situation laisse tout de même place à beaucoup d’incertitude, et il est compréhensible que, pour y faire face, des organisations dressent les profils de compétences de leurs employé.es ou modélisent les compétences existantes. Cela permet de cibler les lacunes, d’assurer les transferts de connaissances, d’anticiper les départs et de faciliter la mobilité interne.

 

De beaux lendemains 

 

La transformation du marché du travail que nous vivons actuellement ouvre des perspectives fascinantes et prometteuses, bien que parfois exigeantes. Cette période sera propice à des opportunités inédites, telles que le renforcement du mentorat intergénérationnel pour favoriser un véritable échange de savoirs entre toutes les générations, au-delà des schémas traditionnels.

 

Les entreprises seront également amenées à repenser la gestion des talents en coconstruisant des parcours de carrière sur mesure, alignés sur les compétences en constante évolution, et en collaboration directe avec les membres du personnel. De plus, l’accent devra être mis sur le développement des compétences en leadership, notamment pour aider les cadres intermédiaires à naviguer dans un environnement VICA (volatile, incertain, complexe, ambigu).

 

L’IA jouera un rôle essentiel dans l’optimisation des processus administratifs et de recrutement, en réduisant les tâches répétitives et en améliorant l’expérience candidat·e tout en luttant contre les biais potentiels. Cependant, une vigilance constante sera nécessaire pour s’assurer que ces outils technologiques restent justes et inclusifs.

 

Enfin, les organisations devront nourrir une culture d’adaptabilité et d’innovation, en mettant en avant leurs valeurs et leur marque employeur pour attirer des talents diversifiés. Anticiper les tendances, utiliser la technologie à bon escient et se poser les bonnes questions seront des leviers pour réussir cette transition.

 

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